Témoignage déposé le 21/08/2022
J’ai vécu deux grossesses surprises coup sur coup : en 2021 et en 2022, 8 mois d’écart entre les deux grossesses. J’ai vomi 3 à 10x par jour chaque jour pour chacune d’entre elles. J’ai eu la chance d’être bien suivie et prise au sérieux par ma gynécologue mais elle-même était démunie face à ma situation : Zophren, hospitalisations répétées, perfusions, isolement. J’ai vécu un enfer pendant ces 18 mois de grossesse et un traumatisme comme jamais je ne pensais.
La souffrance de l’hyperémèse gravidique n’était pas seulement physique mais psychologique : j’ai vomi dans tellement d’endroits, en public, seule, au volant, dans des poubelles, dans mes sacs, dans mes mains… Ne jamais aller nulle part sans sac en plastique, vomir en conduisant, perdre du poids, se réveiller en vomissant.
Ma première grossesse s’est finie par un déclenchement à 38SA+5 pour retard de croissance, l’angoisse de faire du mal à mon bébé se rajoutant à tout ça. Le post-partum a été d’une rare violence : je m’étais préparée et pourtant… Je n’arrivais pas à accepter comment ma grossesse s’était déroulée, j’ai fait une dépression post-partum sans le voir. Je ne supportais pas d’allaiter ma fille alors que ça me tenait à cœur parce que je reliais cet acte à la grossesse et ça me provoquait des rejets. J’ai eu un corps étranger : après avoir perdu 7 kilos pendant la grossesse, j’en ai subitement pris plus de 15 dans ce post-partum. On me disait de tourner la page, d’oublier…
8 mois plus tard je retombe enceinte, surprise de nouveau mais nous sommes heureux. Je commence à avoir peur que l’HG revienne mais on me rassure : pas une grossesse ne ressemble à une autre, ça va aller. Je vais bien jusqu’à 9SA. A partir de là, les vomissements reviennent et cette fois-ci ci, il faut s’occuper de la plus grande. Je développe des techniques afin de vomir « efficacement » : des sceaux devant la table à langer pour vomir tout en tenant ma fille, des sacs poubelles attachés à mon cou quand je conduis (ma hantise, qui m’arrivera plusieurs fois : vomir au volant avec ma fille à l’arrière)… Je n’en peux plus, j’en veux à mon corps, à cette grossesse. J’ai quotidiennement des mauvaises pensées, je ne veux plus être enceinte. Ma carrière en pâtit puisque je suis arrêtée très tôt encore une fois. L’accouchement est finalement déclenché de nouveau, cette fois-ci à 36SA après une énième hospitalisation.
C’était il y a 2 semaines. Mais cette fois-ci j’ai bien mieux anticipé mon post-partum : j’ai réclamé d’être entourée par ma famille, réclamé de l’aide. Je savais à quoi m’attendre et j’ai anticipé pas mal de chose notamment sur le plan émotionnel. Je navigue à vue et surtout je sais que cette grossesse était la dernière. Je ne veux plus jamais revivre ça. Mon mari va faire une vasectomie et cette décision a littéralement sauvé mon couple car je ne pense pas que j’aurai supporté l’idée d’une troisième grossesse.
Notre famille est complète, nos 2 filles sont en bonne santé. Je n’oublierai jamais cet enfer, je serai toute ma vie jalouse des femmes qui ont la chance de vivre leurs grossesses autrement. Si aujourd’hui je vais bien, c’est parce que j’ai dû malheureusement tirer un trait sur le fait de vivre ce que j’avais toujours projeté : la grossesse sereine, l’accouchement spontané.
Merci du fond du cœur pour tout ce que vous faites.
